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«La nécessité instinctive de découvrir mon identité»Alexandrine Siham

L'Hebdo Magazine Vendredi 05 Novembre 2004

 

Alexandrine Siham
«La nécessité instinctive de découvrir mon identité»

A quatre ans, Alexandrine Siham est arrachée à sa terre natale pour être accueillie au sein d'une famille adoptive française. Vingt-six ans plus tard, elle se lance à la recherche de ses origines ce qui l'aide à se réconcilier avec la vie. Un témoignage de vérité relaté dans son livre L'enfant du secret.Rencontre.

Ecrire sa vie n'est pas une chose évidente surtout lorsque celle-ci a été une expérience plutôt particulière, qu'est-ce qui vous a poussée à le faire?
C'est ma photo prise au pied des colonnades du temple de Baalbek, illustrant d'ailleurs la couverture de mon bouquin, qui a tout déclenché. Un cliché immortalisé en 1969, date de mon départ pour la France avec mes parents adoptifs, alors âgée de quatre ans. Jusque là, j'avais été accueillie par les sœurs . Pendant des années, je ressassais cette photo qui marquait une étape charnière dans mon existence. En 1973, j'avais demandé à venir voir l'endroit qui m'a hébergée durant les quatre premières années de mon existence, la terre où j'étais née. Ce premier voyage fut très douloureux. Je me suis retrouvée de l'autre côté de la barre en voyant tous ces , en me voyant en quelque sorte. En revanche, la seconde rencontre avec mon pays natal effectuée en 1996 fut formidable. Non seulement je suis tombée amoureuse de mon pays, mais j'ai pu apprivoiser tous les cauchemars qui s'étaient greffés sur la crèche: les odeurs, les escaliers, les bras d'une femme étrangère qui m'enlaçait, bref un bon nombre d'images qui me hantaient. Ça m'a donné envie de retraduire mon histoire dont des bribes étaient déjà consignées d'une manière désorganisée.

Pourquoi avoir intitulé ce livre, ?
Il y a une pléiade de secrets qui entoure l'acte d'adoption. Le premier étant porté par l'enfant lui-même, comme un mystère gravé au fond de lui. Il y a également le secret qui est gardé par les parents biologiques qui abandonnent leurs progénitures mais aussi celui qui est entretenu par les religieuses de la crèche afin de garder la vie sauve à ces filles-mères et à leur famille. Sans oublier le secret de ma famille adoptive qui avait prétendu que les circonstances de mon adoption avait été la mort de mes parents naturels. Par peur de me perdre et de me faire mal, elle m'avait maintenue dans une contre-vérité que j'ai finie par apprendre à trente ans. Savoir que mes parents n'étaient pas morts a légitimé ma recherche identitaire qui a débuté par une tournée dans les endroits susceptibles de m'apporter une certaine lumière jusqu'à un appel à témoin fait à la télévision locale.

Comment vos parents adoptifs ont réagi à l'égard de votre démarche identitaire?
Il y avait en moi une nécessité instinctive de découvrir mon identité. Pour pouvoir me reconstituer, j'avais besoin de connaître les circonstances de ma naissance et de mon abandon, de mettre des explications sur les points d'interrogation. Il est vrai qu'il m'a été difficile de faire comprendre à ma famille adoptive qui m'avait tout donné que je recherchais mes parents biologiques sans remettre en cause le lien qui nous unit. C'est une vraie histoire d'amour qui se construit au fur et à mesure qu'on apprend à se connaître, à cerner ses limites respectives dans le respect de l'autre et de soi.

Considérez-vous aujourd'hui que vous avez pu apprivoiser vos peurs...
Ce livre est le cri de tous les enfants délaissés qui reviennent en souffrance des quatre coins du monde en quête de leurs origines. Il est en effet intéressant de savoir à quel point les stigmates de la séparation marquent un enfant adopté mais aussi à quel point le fait d'identifier le lieu de sa naissance peut énormément l'aider à se réconcilier avec son histoire. En ce qui me concerne, le fait de retourner à la crèche m'a permis de me réconcilier avec mon passé et de reconnaître les premiers murs de ma souffrance. Aujourd'hui la société française reconnaît l'importance de cette démarche et a mis sur pied le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, instance chargée d'aider les enfants nés sous X en quête de leur histoire et de leur identité biologique.

... et vous réconcilier avec la vie?
Je suis reconnaissante envers ma mère qui m'a gardé la vie sauve plutôt que de me tuer à la naissance comme c'est souvent le cas de beaucoup d'enfants. Et surtout qu'elle m'ait confiée à une institution légale plutôt que de me laisser cheminer via des filières illégitimes, à l'instar de milliers d'enfants qui ont transité par l'Europe sans papiers d'identité sur eux. Je suis reconnaissante envers ma famille adoptive, une famille de cœur qui m'a tout donné. Dans mon histoire, dans ce parcours identitaire, je témoigne surtout de mon amour pour mon pays natal. Je crois que le Libanais a la fibre de son pays par-dessus tout. Il y a en effet un enracinement, une appartenance à la terre ancestrale qui est ineffable. Ce qui me rapproche de mes origines libanaises que je porte d'ailleurs physiquement, m'éloigne de ma famille adoptive. Une dualité parfaite, deux univers différents que j'ai appris à réconcilier sereinement, pas à pas. Le fait d'avoir eu la liberté de décider, de m'acharner, de dire qui j'étais, pour quoi je cherchais, d'être entendue, critiquée m'a permis d'aller de l'avant. Le fait de choisir et non de subir comme cette fille de quatre ans balancée d'un environnement à un autre, m'a aidée à construire cette liberté peu à peu. Au bout du compte, je porte mon fardeau mais j'y ai survécu et j'aime la vie par-dessus tout.

Rechercher la vérité coûte que coûte n'est-il pas des fois regrettable?
Dans la recherche de la vérité, il faut savoir où sont ses limites. Je sais qu'il y a des milliers d'enfants prêts à tout pour trouver leur propre histoire. La vérité pour soi et pour les autres, oui, mais pas à n'importe quel prix.


Une femme entre deux pays

L'enfant du secret a paru aux éditions L'harmattan en octobre 2004. Dans ce récit, une femme raconte son histoire. De l'abandon à l'adoption et jusqu'à l'heure de vérité, Alexandrine Siham ­ connue à la crèche sous le patronyme de Nelly Siham Chamla ­ vivra un déchirement entre deux identités, deux pays: le Liban et la France. Une dualité qu'elle porte au fond d'elle et qui l'a poussée à témoigner dans son premier livre comme un cri d'amour et de reconnaissance envers la vie. Après avoir travaillé dans le marketing international, Alexandrine Siham est installée depuis deux ans au Liban où elle se consacre à des activités sociales. Elle est actuellement chargée de rédiger la monographie de la Mais le souhait le plus cher de celle pour qui l'écriture a toujours été une échappatoire c'est de tenter de soutenir les acteurs de adoptants et parents qui abandonnent.


Des chiffres et des réalités

Un million d'enfants vendus dans le monde, voilà le chiffre alarmant avancé par l'Unicef. Durant la guerre libanaise, plus de 4000 enfants auraient été vendus officieusement aux quatre coins de la planète au prix de 30000 à 40000 dollars par enfant. L'adoption internationale gagne du terrain. La France, où 15% des couples ne peuvent procréer, est le deuxième pays après les Etats-Unis pour l'adoption d'enfants étrangers: 3995 en 2003 d'après la mission de l'adoption internationale. Dans les pays où le «Crime d'honneur» a encore droit de cité, les filles-mères et leurs progénitures sont confrontées à des subterfuges souvent dramatiques pour éviter l'inévitable et préserver le secret. Cinq mille cas par an sont dénombrés en Syrie, Jordanie, Inde, Pakistan,


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Ecrit par Origines Liban le Mardi 5 Juillet 2005, 21:22 dans "" Lu 3043 fois. Version imprimable

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